LES ACADIENS DE
L'ÎLE-DU-PRINCE-ÉDOUARD

Par Georges Arsenault.

La présence des Acadiens à l’Île-du-Prince-Édouard remonte à presque 300 ans. Les premières familles y sont arrivées en 1720 alors que l’île était une nouvelle colonie française nommée île Saint-Jean. En 1758, l’île est tombée aux mains des Britanniques et le gros de sa population acadienne a été déportée en France. La plupart des autres habitants ont réussi à échapper à la déportation en se réfugiant sur le continent. Dans les années qui ont suivi, plusieurs familles sont revenues s’établir dans l’île se joignant à quelques autres familles qui étaient restées sur place en1758. Le gros de la population acadienne actuelle de la province descend de ces familles.

Leur rétablissement s’avère problématique. Les terres de l’île ayant été octroyées à de grands propriétaires terriens britanniques, les Acadiens sont contraints à devenir locataires. Parfois malmenés par ces propriétaires et leurs agents, de nombreuses familles sont contraintes à quitter leurs terres et à recommencer le défrichage ailleurs. Enfin, ils réussissent à s’établir de façon permanente dans plusieurs coins de l’île : dans la région de Rollo Bay (comté de Kings), dans la région de Rustico (comté de Queens), et dans plusieurs régions du comté de Prince, soit dans les paroisses de Tignish, Palmer Road, Bloomfield, Baie-Egmont, Mont-Carmel et Miscouche. Jusqu’au milieu des années 1900, la majorité des Acadiens vivent principalement de la terre et de la mer.

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Bénédiction des bateaux à Mont-Carmel, vers 1900. (Coll. Georges Arsenault, Fonds 83, Centre de recherche acadien de l’Île-du-Prince-Édouard)

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Bénédiction des bateaux au Quai d’Abram-Village, 2008. (Coll. Meghan Forsyth)

Pendant plus d’un siècle après la Déportation, la communauté acadienne demeure un peuple à part et minoritaire dans l’île qu’elle partage avec des colons anglais, écossais et irlandais, et bien sûr avec la petite communauté mi’kmaq.

Là où ils sont majoritaires, les Acadiens réussissent assez bien à éviter pendant longtemps l’assimilation culturelle et linguistique. Les liens de parenté sont forts dans leurs villages ce qui favorise une vie communautaire intense où l’entraide est un principe bien ancré. Les occasions pour se divertir sont nombreuses : les fêtes traditionnelles comme la Noël, le jour de l’An, les Rois, la Chandeleur, les jours gras, la Mi-Carême, sans oublier les noces. Il y a aussi les veillées qui couronnent les nombreuses corvées qui regroupent les voisins pour accomplir certains travaux importants. Toutes ces fêtes sont autant d’occasions pour se livrer à la danse, au chant et aux contes.

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La Chandeleur à Mont-Carmel, Î.-P.-É., vers 1930. (Coll. David Le Gallant, Fonds P117, Centre de recherche acadien de l’Île-du-Prince-Édouard)

L’anglicisation des Acadiens de l’Île commence surtout dans la seconde moitié du 19e siècle. Les facteurs sont multiples : les mariages exogames, le manque d’enseignement en français, le statut inférieur de la langue française, l’urbanisation, sans oublier que la plupart des Acadiens vivent entourés d’anglophones. Afin de contrer ce courant d’assimilation linguistique et culturelle, de nombreuses initiatives sont prises au fil des années. Elles visent l’éducation française tout comme la promotion et la valorisation de l’identité et de la culture acadiennes, et de la langue française.

Aujourd’hui, on compte six écoles françaises à l’Île-du-Prince-Édouard répandues dans quatre des régions traditionnelles acadiennes et dans les deux principales villes, soit Charlottetown et Summerside. Elles jouent un rôle capital dans le maintien de la langue française dans la province insulaire, permettant en même temps à de nombreux Acadiens anglophones de retrouver leur langue ancestrale. Les écoles, qui pour la plupart sont jointes à un centre communautaire francophone, contribuent à valoriser l’histoire, la culture et les traditions acadiennes et locales. Ainsi, la musique et la danse traditionnelles font souvent partie du programme d’activité offert par ces centres communautaires.

Plus que jamais, la culture acadienne est mise en valeur et célébrée à l’Île-du-Prince-Édouard. Après 300 années de survie, contre vents et marées, les Acadiens et Acadiennes ont toutes les raisons d’être fiers de leurs réalisations et confiants en leur avenir.